Marie-Angèle Hermitte et Francis Chateauraynaud

L’interdisciplinarité : comprendre ce qui est dessous ou dessus.

Les intervenants

Marie-Angèle Hermitte et Francis Chateauraynaud
Conférence de Marie-Angèle Hermitte et Francis chateauraynaud, 25/09/2015

Marie-Angèle Hermitte, juriste, directeur de recherche honoraire au CNRS, directeur d’études honoraire à l’EHESS, a été essentiellement chercheur, avec une activité mesurée d’enseignement, d’administration de la recherche et d’expertise. Ayant toujours choisi des sujets de recherche relativement spécialisés, du droit de la concurrence à la protection des lanceurs d’alerte en passant par le droit des brevets et la bioéthique, c’est en diversifiant ses sujets de recherche qu’elle a cherché à monter en généralité. Ainsi, à ses premiers travaux sur le droit de la concurrence qu’elle a menés dans une perspective économique, elle a ajouté des connaissances en biologie pour ses travaux sur les biotechnologies, tout en travaillant le rapport à la nature d’un point de vue philosophique. Il s’est agi, ensuite, plutôt d’histoire (la transfusion sanguine), de sociologie politique (démocratie technique) ou d’anthropologie (droits intellectuels des peuples autochtones).

Francis Chateauraynaud, sociologue, directeur d’études à l’EHESS, où il dirige le Groupe de Sociologie Pragmatique et Réflexive (GSPR) qu’il a fondé en 2001. Il a créé la notion de lanceur d’alerte et a développé de multiples recherches sur les controverses environnementales ou technologiques (nucléaire, amiante, OGM, nanotechnologies, gaz de schiste etc). Dès les années 1990, ses travaux l’ont conduit à collaborer avec d’autres disciplines, comme l’informatique (pour la conception des logiciels Prospéro et Marlowe), l’économie (avec Christian Bessy sur l’économie du faux et de la contrefaçon), la linguistique argumentative (avec Oswald Ducrot puis Marianne Doury), la science politique (avec Jean-Michel Fourniau et Loïc Blondiaux sur la démocratie participative) ou encore la philosophie (récemment avec Sylvain Lavelle sur la dialectique du for intérieur et du for extérieur). Les discussions et les travaux menés de longue date avec Marie-Angèle Hermitte ont fait mûrir l’idée d’un ouvrage d’entretiens, concrétisée avec Le droit saisi au vif (Paris, Pétra, 2013).

 

Conférence

Marie-Angèle Hermitte et Francis chateauraynaud, le 25 septembre 2015, à l’IMéRA, Marseille.

 

 

Après avoir rappelé la longue gestation de leur dernier livre*, et les principaux thèmes qui y sont développés, notamment la question des rapports entre sciences et droits, F. Chateauraynaud et M-A. Hermitte présenteront leurs pratiques de l’interdisciplinarité.

Souvent interrogée sur ses idées sur l’interdisciplinarité, avec des questions théoriques dans lesquelles elle ne se retrouve guère, Marie-Angèle Hermitte considère qu’il s’agit, pour elle, d’une pratique multiple, casuistique, qui s’enrichit au fil du temps, en n’abandonnant rien en cours de route. L’interdisciplinarité, c’est aussi la multiplicité des centres d’intérêt. Pour Francis Chateauraynaud, c’est plus la confrontation voire le conflit épistémique entre les regards disciplinaires qui sont créatifs et heuristiques.

Pourquoi, sur un sujet précis, sort-on de sa discipline ?
  • Le rôle de la simple curiosité, de la volonté d’éclairer tel ou tel angle mort.
  • La clôture des représentations du problème imposée par les financeurs.
Comment fait-on ?
  • Les méthodes devenues classiques (un travail collectif réunissant différentes disciplines). Intérêts et risques associés à ces méthodes.
  • L’interdisciplinarité institutionnelle (un organisme pluridisciplinaire, quel qu’il soit, imposant de travailler côte à côte à un projet commun).
  • L’importance du travail de terrain, sur lequel surgissent des compétences très différentes, remettant en question la spécialisation ou le repli disciplinaire du chercheur.
  • La culture générale et le sens de la mise en variation critique du raisonnement.
Comment en rendre compte ?
  • Devenir un spécialiste … au rabais.
  • Réciter des mantras … sans intérêt.
  • Lire, faire, oublier et écrire en s’appuyant sur la culture ainsi ingérée.

 

*Le Droit saisi au vif. Sciences, technologies, formes de vie, Paris, Pétra, 2013